Comment (et pourquoi) mesurer le sentiment des investisseurs ?
À court terme, la bourse fluctue selon les sentiments des investisseurs, partagés entre la peur et la cupidité. Il existe un indicateur objectif qui mesure le sentiment ambiant. Mais les investisseurs ont parfois des comportements si inconséquents que même l’indicateur lance des messages contradictoires. Que faut-il en penser ?
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Un indicateur objectif qui mesure le sentiment des investisseurs
Les fluctuations du marché ne préoccupent pas celui qui investit avec un horizon de rendement à long terme.
Cependant, mesurer correctement le sentiment des investisseurs à un moment précis donne l’occasion d’acquérir des titres de qualité à rabais et de se départir de ceux dont le prix a bondi de manière excessive.
Il existe un indice qui aide à déterminer si le marché boursier est correctement évalué.
Le Fear & Greed Index (FGI) (1) quantifie l’importance relative des 2 principales émotions qui affectent le comportement des investisseurs boursiers, soit la peur et la cupidité.
À moins de 50, la peur domine. En dessous de 20, le sentiment de peur est extrême. À plus de 50, la cupidité est le sentiment dominant. Dépassé 80, on parle de cupidité extrême.
La logique est que la peur tend à faire baisser le cours des actions de manière excessive. Inversement, lorsque la cupidité domine, les cours boursiers tendent à être surévalués (2).
Comment on calcule le FGI?
L’indice prend en compte 7 facteurs pour mesurer le degré relatif de peur et de cupidité sur le marché :
1 – La valeur de l’indice S&P 500 vs sa moyenne mobile de 125 jours.
Un écart positif évoque la cupidité.
2 – Le nombre de titres dont le prix a touché un sommet vs un creux au cours des 52 dernières semaines.
Un écart positif évoque la cupidité.
3 – Le volume des titres dont le prix a monté vs ceux dont le prix a baissé.
Un écart positif est signe de cupidité.
4 – Le ratio options de vente / options d’achat
Un ratio positif est signe de peur.
5 – Le degré de volatilité des options, représenté par l’indice VIX
Plus la valeur du VIX est élevée, plus le sentiment de peur prévaut.
6 – L’écart de prix entre les stocks vs les obligations (moyenne des 20 derniers jours)
Une hausse de prix plus importante des stocks est signe de cupidité.
7 – L’écart de taux d’intérêt entre les obligations spéculatives (junk bonds) et les obligations classiques
Plus l’écart de taux est important, plus le sentiment de peur prévaut.
Chaque élément a un poids égal dans le calcul de l’indice.
Que nous dit l’indice FGI présentement?
En date du 23 août, le FGI est de 46, à mi-chemin entre la peur et la cupidité.
Il faut savoir 2 choses :
1 – Il s’agit d’une moyenne
À 46, on est tenté de conclure que le marché est correctement évalué dans son ensemble.
Mais il s’agit d’une moyenne; quand on pousse l’analyse, on se rend compte que les 7 facteurs (décrits ci-haut) traduisent des sentiments opposés!
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2 – L’indice fluctue sensiblement sur de courtes périodes
À court terme, le FGI est susceptible de fluctuer de manière significative. Le graphique suivant illustre les variations depuis un an :
Constats
On arrive mal à expliquer comment :
♦ les 7 facteurs du FGI peuvent traduire des sentiments opposés au même instant !
♦ les sentiments des investisseurs peuvent changer abruptement sur de si courtes périodes.
Ces deux constats prouvent qu’à court terme, les comportements des investisseurs sont souvent inconséquents et erratiques.
C’est pourquoi, ils sont (et seront toujours) imprévisibles.
Une forte corrélation avec le rendement de la bourse
Il existe une forte corrélation entre les sentiments des investisseurs et le rendement de la bourse. Voici comment se compare les variations du FGI et celles du principal indice boursier américain (S&P 500) depuis 1 an :
La corrélation est frappante.
Incontestablement, elle prouve que les sentiments de peur et de cupidité sont les facteurs qui déterminent le rendement des marchés boursiers à court terme.
Il est impossible de prédire le comportement de la bourse. Les prédictions boursières font le bonheur de leurs auteurs. Comme le rappelle Warren Buffett, leur utilité se résume à donner bonne presse aux diseurs de bonne aventure.
À l’opposé, l’investisseur peut tirer avantage du FGI.
Contrairement aux bavardages d’experts qui tentent d’interpréter les fluctuations de la bourse, le FGI est une mesure quantitative et objective qui traduit les sentiments qui prévalent sur le marché à un moment précis.
L’indice devient vraiment intéressant lorsqu’il atteint des niveaux extrêmes. En dessous de 20, il laisse croire que les marchés seraient fortement sous-évalués. Au-dessus de 80, les marchés seraient carrément surévalués.
Les niveaux extrêmes du FGI suggèrent soit que :
♦ la peur ambiante a probablement créé des opportunités d’acheter à rabais des titres de qualité,
♦ il serait temps de se départir de titres qui, dans l’euphorie générale, auraient atteint des niveaux de prix excessifs.
Lorsque les circonstances s’y prêtent, il est impératif de procéder sans délai. Parce que l’humeur des investisseurs peut changer rapidement et, avec elle, le prix des titres boursiers.
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Le FGI fournit une mesure objective du pouls de la bourse. L’outil peut se révéler fort utile pour identifier des transactions susceptibles d’optimiser le rendement du portefeuille.
Cela étant, on doit l’utiliser uniquement comme complément à l’analyse des données fondamentales qui visent à déterminer si les titres convoités satisfont aux critères de sélection pertinents (3).
On peut consulter l’indice en tout temps en cliquant ici.
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(1) Le FGI est un indice développé par le réseau CNN Business. Il est publié à chaque jour ouvrable.
(2) Un titre est surévalué lorsque sa valeur marchande est supérieure à sa valeur intrinsèque. Voir Le meilleur actif à détenir.
(3) Voir Évaluer : titres à revenu fixe, titres à dividendes, titres d’entreprises incontournables, titres de métaux précieux.
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FAQ
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Comment évaluer la tolérance au risque?
L’horizon de rendement détermine la capacité à composer avec le risque. Un horizon de rendement de 10 ans et plus assure une tolérance optimale au risque. En retour, cela augmente de façon exponentielle les probabilités de réaliser un rendement positif.
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Est-ce que les options augmentent le risque du portefeuille?
Les options peuvent diminuer le risque du portefeuille (cliquer ici). C’est le cas avec la vente d’options d’achats couvertes et l’achat d’options de ventes. On peut aussi utiliser les options pour augmenter le rendement potentiel de l’investissement. C’est le but lorsqu’on achète des options d’achats. Mais ce type de transactions augmente aussi le risque de perdre le montant investi.
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Peut-on perdre son capital en achetant des obligations?
Le risque d’investir dans une obligation dépend de la capacité de l’émetteur de payer les intérêts aux dates prévues et à rembourser le capital à l’échéance. Il est utile de consulter la cote de crédit de l’émetteur pour en évaluer le risque.
Cet article a été rédigé par Marc-Olivier Desmarais, CPA, Pl. Fin.
Il est planificateur financier indépendant. Sa pratique est encadrée par l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) et par l'Institut de Planification Financière (IPF).
À travers les articles de Portefeuille 101, son objectif est de contribuer à la littératie financière et de stimuler la réflexion en matière de finances personnelles.