Pourquoi l’investisseur a un rendement inférieur au marché
Année après année, l’investisseur moyen réalise un rendement inférieur au marché. Sur les 20 dernières années, le rendement annuel de l’indice S&P 500 a été de 6,1% alors que l’investisseur américain a réalisé un rendement moyen de 4,2% (1). Pourquoi donc ?
On peut invoquer trois (3) raisons:
1 – La méconnaissance du rendement.
Une majorité d’investisseurs ne connaissent pas le rendement de leur portefeuille sur 1,3 ou 5 ans. Ceux qui le connaissent n’ont pas d’indices de référence crédibles contre les lesquels ils devraient comparer leur rendement. Cela se comprend quand on sait que peu de conseillers professionnels utilisent des indices de référence contre lesquels ils devraient comparer le rendement de leurs portefeuilles-clients.
L’investisseur a un rendement médiocre parce qu’il ne le mesure pas et ne le compare pas. Ce qu’on ignore ne fait pas mal. Surtout quand on se contente de généralités du style :
◆ Il faut regarder le rendement dans une perspective à long terme,
◆ Le portefeuille a baissé mais ce sont des pertes sur papier.
Ces commentaires insipides perpétuent l’ignorance de l’investisseur. Parler d’une perspective à long terme sans définir ce qu’on entend par long terme est un commentaire sans substance. Parler de pertes sur papier est un sophisme. Car si les pertes sont “sur papier”, alors les gains le sont aussi. Cela revient à dire que l’augmentation ou la diminution de valeur d’un portefeuille n’aurait aucune signification dans le temps.
2 – Le syndrome de la foule
L’investisseur typique a tendance à suivre ce que les autres font. Il achète les titres qu’une majorité d’investisseurs achète. Le syndrome de la foule est particulièrement évident au regard de l’influence qu’exercent les réseaux sociaux sur les jeunes investisseurs.
La conséquence est celle-ci : un titre monte parce qu’une majorité d’investisseurs l’achètent. De la même façon, lorsqu’une majorité d’investisseurs croient qu’un titre est surévalué, ils le vendent. Ces ventes font baisser le cours du titre.
L’investisseur moyen a tendance à acheter lorsqu’il faudrait vendre et vice-versa. Pour faire de l’argent, on doit se méfier de l’opinion de la majorité.
3 – L’aversion de perdre
Daniel Kahneman (prix Nobel en économie) a démontré que l’aversion pour le risque pousse les investisseurs à donner un poids démesuré aux pertes financières par rapport aux gains. Les investisseurs développent ainsi une peur démesurée face au risque, ce qui les conduit à prendre des décisions irrationnelles en matière de placements.
Cette attitude explique également un autre phénomène qu’on appelle l’effet de disposition, lequel a été mis en lumière dans les travaux de Kahneman et Tversky Ceux-ci ont démontré la tendance avérée des investisseurs à vendre trop tôt leurs titres gagnants et à vendre trop tard leurs titres perdants. C’est l’aversion instinctive de perdre qui stimule cette tendance à conserver les titres perdants.
L’investisseur rationalise la décision de conserver un titre perdant en se basant sur une approche promue dans la littérature populaire : le « dollar cost averaging (DCA)». Selon cette approche, lorsqu’un stock baisse, on achète des actions (ou unités) additionnelles ce qui permet d’abaisser le coût moyen des unités détenues. Pourtant, le DCA n’est justifié que si le prix d’un stock baisse alors qu’on n’observe aucune détérioration de ses données fondamentales.
Comme on le voit, l’investisseur doit parfois composer avec deux besoins émotifs, soit le syndrome de la foule et l’aversion de perdre.
À quoi sont reliés ces facteurs de sous-performance?
1 – La méconnaissance du rendement
…est un facteur de sous-performance lié à l’éducation. Peu de parents initient leur enfant à l’investissement. Plusieurs en sont encore au stade du « petit cochon » dans lequel on dit à l’enfant de déposer les sous qu’il reçoit. On enseigne à l’enfant à accumuler de l’argent qui ne produit aucun rendement. On oublie d’enseigner le premier principe de l’investissement : utiliser l’argent pour produire de l’argent. C’est comme si nous n’avions pas de pouvoir sur le rendement que produit notre capital.
2 – Le syndrome de la foule
…est lié au besoin d’appartenance. Dans l’échelle de Maslow, le besoin d’appartenance précède le besoin d’estime de soi. Le besoin d’appartenance est comblé lorsqu’on a le sentiment d’appartenir au groupe de référence auquel on s’identifie. En matière de placements, il est fréquent que des gens utilisent les mêmes conseillers que leurs amis ou collègues. Le besoin d’appartenance est si fort que ce n’est pas la performance du conseiller qui constituerait le principal critère de choix, mais le fait que ce conseiller soit choisi par des gens auxquels on s’identifie ou qu’on admire.
3 – L’aversion de perdre
…est un biais psychologique inné. Il existe naturellement chez l’être humain. Il dépasse les questions d’argent. Instinctivement, l’individu déteste perdre; c’est une question de fierté, mais aussi de survie. À la bourse, vendre un stock à perte, c’est contre nature. Pour plusieurs, seule la panique oblige à vendre à perte.
Quelle est la solution?
Un comportement inspiré des 3P (persévérance, prudence, patience) et une structure de portefeuille explicite sont deux éléments qui isolent l’investisseur des facteurs de sous-performance et lui permettent de réaliser un rendement supérieur.
PORTEFEUILLE 101 propose une approche et une structure de portefeuille explicite, inspirées d’une philosophie axée sur les 3P.
(1) Why Average Investors Earn Below Average Market Returns, The Balance, 27 mai ’21.
FAQ
Quels sont les principaux facteurs qui affectent le rendement du portefeuille?
Le premier facteur est le comportement de l’investisseur. On peut évaluer ce comportement selon trois qualités : la persévérance, la prudence et la patience. Le deuxième facteur est la structure qui balise la répartition du portefeuille afin d’avoir une allocation optimale des placements.
Qu’est-ce qu’un bon rendement?
Un bon rendement est égal ou supérieur au rendement de son indice de référence sur une période de trois à cinq ans. L’indice de référence tient compte du rendement des marchés boursiers et du niveau de risque selon lequel le portefeuille a été bâti.
Quelle taille le portefeuille doit-il avoir pour réaliser un bon rendement?
Un portefeuille de taille modeste peut réaliser un rendement supérieur à la moyenne tout autant qu’un gros portefeuille. Dans les deux cas, le comportement de l’investisseur et la structure du portefeuille ont une importance déterminante sur le rendement.
Cet article a été rédigé par Marc-Olivier Desmarais, CPA, Pl. Fin.
Il est planificateur financier indépendant. Sa pratique est encadrée par l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) et par l'Institut de Planification Financière (IPF).
À travers les articles de Portefeuille 101, son objectif est de contribuer à la littératie financière et de stimuler la réflexion en matière de finances personnelles.