Une débâcle boursière (pas) comme les autres?
6 mars 2020
Entre le 20 et le 28 février, les indices S&P 500 et TSX ont connu des chutes records de 9% et 12%. Depuis, ils reprennent et perdent du terrain quasiment à chaque jour.
L'important n'est pas d'essayer de prédire comment se terminera cette débâcle. Mais plutôt de déterminer comment elle devrait affecter la gestion de notre portefeuille.
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Entre le 1er janvier et le 20 février 2020, les indices S&P 500 et TSX avaient gagné 4% et 5% respectivement. Puis, du 20 au 28 février, ils ont chuté de 12% et 9%, leur pire semaine depuis la crise financière de 2008. En date du 5 mars, les indices avaient repris une bonne partie du terrain perdu. Mais ils ont quand même chuté de 6% et 3% depuis le début de 2020.
Il est fort possible que les marchés subissent encore de fortes variations au cours des prochaines semaines.
Quand et comment cela se terminera-t-il ?
Synopsis des causes
Des experts attribuent la débâcle à la propagation du coronavirus. Le coronavirus amène une contraction des échanges non seulement à l’échelle mondiale mais à l’intérieur même des états. On en constate déjà les effets sur plusieurs industries, dont le transport et le tourisme ne sont pas les moindres. On ne sait pas combien de temps cette situation de repli va durer.
D’autres experts croient que le coronavirus a agi comme déclencheur d’une crise qui devait arriver incessamment. Les causes réelles sont que le niveau extrêmement élevé de l’endettement des pays et les déficits budgétaires endémiques qui en sont la source, ont atteint des niveaux intolérables.
À ce sujet, voici ce que déclarait George Ugeux(1) il y a plus d’un an : « Depuis des années, les états se sont endettés à des conditions excessivement favorables… À tel point que des pays comme l’Italie, la France, les États-Unis et le Japon sont arrivés à niveau d’endettement insoutenable…d’ici à fin 2020, nous allons vivre un tsunami financier. Ce qui est arrivé à Lehman Brothers est lilliputien à côté de ce qui nous attend ! »
À preuve de cette hausse vertigineuse de l’endettement public : alimenté par les réductions d'impôt substantielles décrétées par le président Trump, le déficit budgétaire fédéral des États-Unis dépassera $1 trillion cette année. Ce à quoi, il faut ajouter les déficits des états et des organismes publics non consolidés.
Mais, ce qui est beaucoup plus important, ce sont les déficits actuariels. On estime que la dette actuarielle non-capitalisée des États-Unis est de l’ordre de $200 trillions(2), une somme titanesque qu’on a peine à concevoir! Il est compréhensible que personne n'ose aborder la question des déficits actuariels, sans doute parce que le problème est trop complexe… C’est une bombe à retardement.
On peut aussi invoquer d’autres causes, telles que la détérioration de l’environnement, les problèmes migratoires, la montée en puissance des régimes totalitaires, etc.
Quand et comment se terminera cette débâcle boursière?
Les experts sont loin d’être unanimes quant à l’issue de cette crise.
Certains estiment qu’à elle seule, la propagation du coronavirus va causer des pertes économiques substantielles en raison de la diminution drastique des échanges commerciaux et humains qui sont déjà significatifs.
D’autres, dans la foulée de George Ugeux, considèrent que le problème de fond est que la situation économique et fiscale des états est intenable. En ce sens, les compressions imposées à la Grèce il y a 5 ans, vont devenir le lot commun des grands pays. Le phénomène des gilets jaunes en France est le signe précurseur d’une réaction qui risque de s’étendre à l’ensemble des pays riches. C'est pourquoi, selon eux, la crise boursière sera beaucoup plus importante et durera plus longtemps que les crises précédentes.
A contrario, d’autres experts voient dans cette débâcle des occasions d’acquérir des titres boursiers à rabais.
Michel Doucet, VP et gestionnaire de portefeuille chez Desjardins, est un partisan de cette approche(3). Selon lui, au contraire de crises antérieures, les conditions actuelles laissent croire que les perspectives boursières ne sont pas aussi sombres: les bas niveaux des taux d’intérêt, du prix du pétrole et des ressources naturelles, de même que des évaluations boursières raisonnables sont autant de facteurs qui suggèrent que la crise ne serait que temporaire.
Ces gens estiment également que les banques centrales mettront en place des politiques monétaires conciliantes pour contrebalancer les effets du ralentissement économique.
Il est hasardeux de faire des prédictions
Bien malin celui qui peut dire comment et quand cette débâcle boursière se terminera.
La raison est simple : les marchés ne fluctuent pas parce que les nouvelles économiques sont bonnes ou mauvaises. Les marchés fluctuent parce qu’une majorité d’investisseurs décide d’acheter ou de vendre des titres en réaction à ces nouvelles.
Les marchés n’ont pas dégringolé à cause du virus, mais à cause de la peur du virus. Ce n’est pas le niveau d’endettement des pays qui aurait fait baisser les prix des titres; c’est parce qu’une majorité d’investisseurs a décidé de vendre en réaction à des nouvelles qui concernent l’endettement.
Il est hasardeux de faire des prédictions boursières parce que cela revient à essayer de prévoir comment les investisseurs vont se comporter. Sachant qu’à court terme le comportement des investisseurs est principalement motivé par deux sentiments irrationnels: la peur et la cupidité.
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S’appuyer sur des principes incontestables
Il faut se résoudre à conclure qu’il est impossible de prévoir le futur.
C’est pourquoi, la solution est de maintenir un portefeuille de placements sur la foi de principes incontestables :
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1 - À long terme, la protection du rendement est plus importante que la protection du capital investi
Le fondement Comprendre les notions de risque et de rendement explique qu’un rendement médiocre… entraîne un manque à gagner qui se cumule à chaque année. Ce manque à gagner constitue une perte de capital. Plus la période de détention de titres à rendement médiocre (dépôts à terme, obligations d’états) est longue, plus la perte de capital sera importante. C’est pourquoi il est impératif de prioriser le rendement du portefeuille.
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2 - Une diversification équilibrée du portefeuille diminue significativement le risque de perte
Une diversification équilibrée signifie que les variations de valeur des titres détenus ne sont pas corrélées. Pour ce faire, le portefeuille doit être investi dans différentes catégories de titres ayant des caractéristiques distinctes.
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3 - La probabilité de perdre à la bourse diminue à mesure que l'horizon de rendement s'allonge
Le fondement Le temps : le paramètre de rendement le plus important cite une étude démontrant qu’entre 1935 et 2016, un investisseur détenant des actions canadiennes pendant au moins 3 ans a fait de l'argent dans 86% des cas. Aussi, détenir des actions canadiennes sur n'importe quelle période de 10 ans a produit un rendement positif dans…100% des cas!
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4 - À court terme, la valeur des stocks est fortement influencée par les sentiments des investisseurs
Mais à long terme, ce sont les données fondamentales des titres qui déterminent le comportement des investisseurs. Or, il est beaucoup plus facile d’analyser les données fondamentales d’une entreprise (rentabilité, croissance des revenus, endettement, …) que les sentiments irrationnels des investisseurs(4).
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5 – Même en période de crise, des entreprises vont fournir des services à une population qui continue de croître
Les entreprises produisent des biens et services utilisés par une population mondiale qui croît et qui a des besoins fort variés. Certes, la consommation de certains produits est susceptible d’être affectée par une crise économique, mais les besoins demeurent et doivent être comblés.
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6 – Les liquidités doivent être investies quelque part
Avec des taux d’intérêt quasi nuls, les investisseurs ont peu d’options pour investir leurs épargnes en échange d’un rendement décent. La bourse est une destination inévitable pour ce capital extrêmement important.
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7 - Une structure de portefeuille explicite et permanente permet d’optimiser sa performance
Une structure de portefeuille est explicite parce qu’elle définit:
♦ les catégories de placements,
♦ la pondération de chaque catégorie dans le portefeuille
♦ le nombre-cible de titres que le portefeuille devrait compter,
♦ le pourcentage maximum qu’un titre peut représenter sur l’ensemble du portefeuille,
♦ les proportions des titres canadiens et étrangers.
Une structure de portefeuille est permanente parce qu’elle est valable peu importe les mouvements du marché. Elle a été conçue dans une perspective de rendement à long terme.
PORTEFEUILLE 101 propose une structure de portefeuille explicite et permanente.
(1) Patron de la société belge Galileo Global Advisors et auteur du livre La Descente aux Enfers de la Finance, Mars 2019
(2) SDBullion, Septembre 2019
(3) Extrait de commentaires émis lors d’une entrevue à la radio le 28 février 2020
(4) Voir La supériorité des stratégies fondamentales
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Articles connexes
Les titres de valeur: supérieurs aux titres de croissance
La supériorité des stratégies fondamentales