Les pièges du succès – II
Il n’y a rien comme une crise pour enfin voir la réalité. Distinguer l’essentiel du superflu, le productif du stérile, ce qui a un sens et ce qui n’est que vanité. Les masques tombent : on prend les décisions pour survivre. Souvent, il faut franchir un point de non-retour pour renouer avec le succès.
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Pourquoi une crise est-elle nécessaire pour amener un vrai changement?
Dans la 1re partie de cet article, nous avons vu que le succès porte en lui les germes de la défaite.
Au-delà des discours de dirigeants qui se targuent d’être à l’avant-garde du changement, pourquoi des entreprises ont-elles tant de difficulté à changer leurs processus pour préserver leurs avantages compétitifs?
Il suffit de voir ce que la pandémie Covid-19 a démontré.
Printemps 2020. Du jour au lendemain, des employés sont interdits de séjour dans leur entreprise. Des étudiants sont interdits de séjour dans leurs écoles. Des patients ne peuvent plus rencontrer leur médecin.
Résultat : sans préavis, des centaines d’entreprises se réorganisent en quelques jours/semaines pour poursuivre leurs activités dans le respect de contraintes sanitaires. Idem pour les institutions d’enseignement et les établissements de santé. Des changements qui auraient pris des années, sinon des décennies, à concevoir et à mettre en œuvre l’ont été sans délai, sans études de consultants.
Non que l’exercice fût exempt d’anicroches, mais les résultats ont été probants. On a démontré que des tâches corporatives, éducatives et même reliées à la santé peuvent être effectuées à distance. Avec des technologies qui n’avaient pas été adaptées au préalable à un tel scénario.
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Ceci rappelle deux choses :
1 – Sauf pour survivre, on ne provoque pas les vrais changements; on réagit aux exigences de changement.
2 – Les organisations ont une capacité d’innovation qu’elles ne savent pas exploiter, à moins d’y être contraintes.
Une crise a le pouvoir de transformer des problèmes en opportunités
Never let a good crisis go to waste (1). Ainsi Churchill rappelait que les Nations Unies n’auraient jamais vu le jour n’eut été de la 2e guerre mondiale.
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Une crise force les organisations à mettre de côté leurs politiques, procédures, comités et droits acquis au profit de solutions créatives, inédites, parfois drastiques, dont les résultats n’ont pas été testés au préalable.
C’est l’opportunité qu’offre une crise :
1 – Le changement qui protège le confort des dirigeants n’est pas une option
Quoi qu’en disent leurs discours publics, la plupart des gestionnaires ne favorisent pas le réel changement. Cela perturbe leur travail, crée de l’incertitude, met en péril leurs droits acquis, les extrait de leur zone de confort. À preuve, les organisations insistent davantage sur le respect des procédures qu’elles ne récompensent l’innovation. On tolère mal ceux qui osent sortir des sentiers battus. On protège le confort des dirigeants.
Une crise ne laisse pas le choix. Changer n’est pas une option, c’est une condition de survie.
2 – La capacité d’inventer des solutions pour résoudre les problèmes rapidement
Les crises sont déclencheurs d’innovation. L’instinct de survie fait ressortir une capacité de développer des solutions sans être ralentie, ou carrément écrasée, par des chicanes de territoires et des politiques corporatives rigides.
3 – Les gens apprennent à coopérer
Les crises qui mettent en cause la survie d’une entreprise sont d’excellents outils pour démanteler les châteaux forts que sont devenus ses différents départements. Des cadres et employés ayant des divers objectifs et fonctions réalisent combien il est utile de développer des solutions de groupe, endossées par tous.
4 – Des changements systémiques
En l’absence d’une remise en cause de l’existence de l’entreprise, les dirigeants se refusent à abandonner leurs privilèges et leurs acquis.
Les crises font fi de l’ordre et des normes corporatives établies. Le cas échéant, elles obligent à questionner les compétences de la hiérarchie existante. Elles ouvrent la voie à l’émergence de nouvelles structures, de nouveaux processus, voire de nouvelles valeurs.
5 – L’abandon de systèmes de rémunération surannés
L’attribution de boni et d’options d’achat d’actions aux dirigeants est quasiment un prérequis d’emploi.
Quoi qu’on en dise, ces types de rémunération sont liés à la performance à très court terme d’une entreprise cotée en bourse.
Sachant à quel point les cours boursiers sont volatils, ils motivent les dirigeants à se focaliser sur les résultats trimestriels, et non sur une vision à long terme de l’entreprise.
Les crises viennent corriger l’effet de systèmes aussi déséquilibrés. Les mauvais résultats financiers et la précarité de la situation financière font que les incitatifs de performance à court terme perdent soudain toute leur importance.
Résultat : les gestionnaires doivent revenir à l’essentiel, favoriser les initiatives qui contribueront au succès à long terme de l’entreprise. Les chasses gardées des départements ne comptent plus dans la rémunération des cadres. Désormais, on décortique et on évalue les budgets en tenant compte de leur impact sur la performance à moyen et long terme de l’entreprise.
6 – Une résilience accrue face à l’avenir
Les mesures prises pour survivre à une crise prouvent qu’une organisation peut changer pour devenir meilleure. Une crise rend une organisation plus confiante et plus résiliente face aux aléas futurs.
7 – L’émergence de talents
Une crise permet à la crème de monter au sommet. Même s’ils n’avaient auparavant aucune notoriété, des cadres et employés démontrent qu’ils ont les compétences et le caractère pour faire face à une crise.
On reconnaît les pros dans l’adversité de la défaite, et non dans le confort du succès.
Le leadership est la condition essentielle
Les crises ne sont toujours pas la condition préalable à l’innovation. Mais les innovations importantes et les changements de mentalité qu’ils impliquent, exigent souvent l’effondrement de l’ordre, des processus et des droits acquis au sein d’une organisation.
Le changement de trajectoire qu’impose une crise est un exercice exigeant, parfois périlleux. C’est pourquoi, la première condition de succès réside dans la qualité du leadership dont l’entreprise va bénéficier.
Cela explique qu’une sortie de crise va presque toujours entraîner un changement de garde au plus haut niveau de l’organisation.
Comment réduire le risque d’investir dans une entreprise en difficulté ?
Toute entreprise est susceptible de connaître des difficultés financières. Des difficultés qui pourraient mettre sa survie en danger. Rien n’est garanti.
Ce qu’il faut, c’est reconnaître les signes d’une entreprise qui éprouve (ou qui s’apprête à éprouver) des difficultés financières. Certains sont évidents :
1 – Des situations récurrentes
Des situations récurrentes augmentent le risque de défaut d’une entreprise:
® Pertes d’opérations
® Baisse du chiffre d’affaires
® Diminution des marges brutes
® Augmentation du taux d’endettement, non relié à l’acquisition d’actifs productifs.
2 – Des situations ponctuelles
® Perte de clients importants
® Départ imprévu de dirigeants-clés (président, chef des finances,…)
® Litiges légaux ou fiscaux significatifs, fraudes,…
® Situation financière déficitaire.
Il est possible que des circonstances particulières expliquent la situation, auxquels cas on conviendra de s’en satisfaire ou non.
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Une série d’indices suggèrent d’éviter d’investir dans certaines entreprises.
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(1) Ne gaspillez jamais les leçons d’une bonne crise.
FAQ
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Comment gérer une crise d’entreprise?
Parmi d’autres, on peut retenir l’importance de 5 éléments : 1) se recentrer sur les valeurs de l’entreprise, 2) faire preuve de transparence, 3) être présent sur le terrain, 4) valoriser les initiatives des cadres et employés, 5) entretenir une attitude positive.
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Comment reconnaître un bon leader?
Un bon leader tire parti de son expérience, mais reste à l’écoute des personnes qui l’entourent. Il stimule et guide la réflexion de ses collaborateurs. Il donne confiance, il défend et fait progresser ceux qui dépendent de lui.
Comment savoir si une entreprise est en difficulté?
Plusieurs indices peuvent indiquer qu’une entreprise connaît des difficultés financières. Exemples : 1) des flux de trésorerie négatif, 2) des relances fréquentes des créanciers, 3) des difficultés à obtenir du financement, 4) une baisse des ventes.
Cet article a été rédigé par Marc-Olivier Desmarais, CPA, Pl. Fin.
Il est planificateur financier indépendant. Sa pratique est encadrée par l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) et par l'Institut de Planification Financière (IPF).
À travers les articles de Portefeuille 101, son objectif est de contribuer à la littératie financière et de stimuler la réflexion en matière de finances personnelles.