Cultiver un esprit indépendant
L’indépendance d’esprit est un trait des grands investisseurs.
Forger sa propre opinion au risque de contredire les gens avec qui on s’identifie n’est pas une qualité innée. Mais c’est une qualité qu’un enfant assimile facilement pour peu qu’on la lui enseigne.
L’indépendance d’esprit est un gage de succès pour la vie.
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Des gens connectés mais dépressifs
Depuis 2013, les diagnostics de dépression clinique n’ont cessé d’augmenter. Le pourcentage d’adultes américains traités pour la dépression est passée à 10% en 2015 à plus de 18% en 2025.

La dépression serait le 2e problème de santé le plus important après l’hypertension artérielle (1).
À cela s’ajoute le fait que les personnes souffrant de dépression tendent à avoir d’autres problèmes de santé (maladies chroniques, toxicomanie,…). Par conséquent, leurs besoins de soins de santé continueront d’être plus importants au fil du temps.
Le problème n’est pas nouveau. Il touche tous les groupes d’âge.
Mais il est plus prononcé chez les jeunes : +47 % chez les milléniaux*, +47 % chez les adolescents et +65 % chez les adolescentes (2).
L’omniprésence des smartphones et la constante connectivité à des sites et réseaux populaires ne ferait qu’amplifier le phénomène.

L’adoption d’un comportement mimétique
Le problème est qu’on n’enseigne pas l’importance de développer une pensée indépendante. La conséquence est qu’instinctivement on est porté à endosser les opinions et les comportements des gens qui constituent notre groupe de référence.
Cela procure la quiétude de n’avoir à faire aucun effort pour comprendre et juger les événements qui affectent notre monde. Il suffit d’avoir raison (ou tort) avec la majorité!
Résultat : le fait de substituer un comportement mimétique au libre arbitre appauvrit la capacité de développer une pensée originale, structurée, à l’abri des idées colportées par cette majorité.

La pyramide de Maslow
La pyramide de Maslow aide à comprendre la hiérarchie des besoins humains.
La pyramide des besoins se divise entre les besoins de carence (survie, sécurité, appartenance) et les besoins de croissance (reconnaissance, accomplissement).
La principale différence entre les besoins de carence et de croissance réside dans le changement de motivation lorsque les besoins sont satisfaits.
Ainsi, la motivation diminue à mesure que les besoins de carence sont comblés. Inversement, plus on comble les besoins de croissance, plus la motivation augmente.
Les besoins de carence s’aggravent avec le temps. Tant que le besoin n’est pas comblé, la motivation à le satisfaire augmente. Une personne affamée finira par manger n’importe quoi.
En tant qu’investisseur, c’est le 3e besoin de carence qui nous intéresse : le besoin d’appartenance.

La puissance du biais de mimétisme
Il existe plus de 200 biais cognitifs*. Parmi eux, on retrouve le biais de mimétisme.
Dans la pyramide de Maslow, il procède du besoin d’appartenance.
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Lorsqu’il est comblé, le besoin d’appartenance instille un sentiment de confiance.
Adopter le comportement de la majorité réduit le niveau de risque perçu d’un comportement. De la même façon, il cautionne des comportements plus risqués que ceux qu’un individu seul adopterait.
Un bon exemple est la facilité avec laquelle des investisseurs inexpérimentés transigent des titres de cryptomonnaies et de titres-fétiches. Des titres popularisés sur les réseaux sociaux où des « groupes de discussion » entraînent des mouvements de foule auxquels des néophytes adhèrent par peur d’être laissés pour compte.
Le biais de mimétisme est puissant car on joue une partie où les équipes favorites comptent un plus grand nombre de joueurs! Penser et agir comme la majorité procure une confiance inébranlable.

La dépendance aux communications virtuelles et aux réseaux sociaux
Quasiment tout le monde a un téléphone intelligent avec accès à Internet.
Cela étant, les recherches montrent que la génération Z* est anxieuse, bien davantage que les autres générations (3).
Il y a sans doute plusieurs raisons. Mais l’une serait que les téléphones intelligents servent à entretenir une connexion quasi constante à des sites et réseaux auxquels les usagers se réfèrent pour asseoir leurs opinions et leurs comportements. Le terreau idéal pour cultiver le mimétisme.
L’utilisation excessive de téléphones intelligents altère notre confiance les uns envers les autres et diminue la qualité de nos relations.
Une étude publiée en 2025 révèle que la prévalence des téléphones intelligents a profondément influencé la vie des individus, particulièrement des enfants. La dépendance au téléphone intelligent chez les élèves du primaire est une préoccupation mondiale. Elle engendre des conséquences importantes, notamment la dépression, l’anxiété et des relations tendues parent-enfant (4).
La dépendance aux communications virtuelles et aux réseaux sociaux réduit la capacité à développer une mentalité de libre arbitre et renforce le biais de mimétisme.

Apprendre tôt à développer un esprit indépendant
L’indépendance d’esprit s’acquiert dès le plus jeune âge.
Elle se développe lorsque l’enfant devient confiant dans ses capacités et qu’il pose des gestes autonomes.
La confiance en soi provient d’abord de l’encouragement des parents qui stimulent sa curiosité et l’initient à résoudre des conflits avec confiance. C’est le résultat d’un processus où l’enfant apprend à agir et à penser par lui-même, renforçant ainsi sa résilience et sa capacité à interagir de manière constructive avec son environnement.
En matière de placements, quatre (4) comportements caractérisent un esprit indépendant :
1 – Investir quand les experts recommandent de vendre.
2 – Éviter d’investir dans les entreprises qui font les manchettes sur les réseaux sociaux.
3 – Ignorer les prévisions boursières d’experts (avérés ou auto-proclamés).
4 – Adopter et maintenir une structure de portefeuille conforme à 3 principes intemporels : les 3P.
En matière de finance, on reconnaît un esprit indépendant à la désaffection qu’il accorde au prestige que procure l’argent et aux apparats dispendieux qu’il invoque.
Un esprit indépendant fait la différence entre un rêve et un objectif
® Être riche est un rêve,
® Être financièrement indépendant est un objectif.
Être riche ne veut rien dire. On est riche par rapport à des gens et pauvre par rapport à d’autres. Le désir d’être riche implique celui de paraître riche.
Pour paraître riche, il faut dépenser pour en témoigner: une auto luxueuse, des vêtements griffés, des bijoux, une résidence dans un quartier huppé, des restaurants dispendieux, un yacht,… Ceci exige de hauts revenus. On doit parfois s’endetter.
Des gens consacrent beaucoup d’efforts à paraître riches; c’est pourquoi ils ne le seront jamais comme ils le souhaitent.
Mais celui dont l’objectif est d’atteindre l’indépendance financière, mesure l’impact financier de ses décisions et fait fructifier son capital. Il n’a cure des apparences. Son bien le plus précieux est la liberté.
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Chez les enfants, il ne faut pas cultiver le désir d’être riche mais celui d’atteindre l’indépendance financière, tout autant que l’indépendance d’esprit. L’un est une question de paraître, l’autre est une question d’être.
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(1) Depression Has Spiked By 33% In the Last Five Years, Time
(2) Data & Reports, Blue Cross Blue Shield, Oct ’20.
(3) Selon l’American Psychological Association.
(4) The impact of smartphone addiction and negative emotions…, National Library of Medicine, June ’25.
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FAQ
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En quoi une pensée indépendante constitue un avantage en matière de placements?
Une pensée indépendante est cruciale car elle protège les investisseurs des effets pervers d’une mentalité de troupeau. Elle le force à évaluer par lui-même les occasions de placements qui se présentent à lui. Cette approche mène à un potentiel de rendements élevés en acquérant notamment des actifs que la majorité ignore.
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Comment insuffler l’indépendance d’esprit à un enfant?
Voici quelques façons de développer un esprit indépendant chez un enfant :
1) lui permettre tôt de faire des choix conséquents avec son âge,
2) l’encourager à prendre des décisions qui répondent à ses besoins plutôt qu’à vouloir plaire aux autres,
3) enseigner à voir les échecs comme des occasions d’apprendre, et non comme des raisons de se décourager.
4) lui montrer comment faire les choses, puis le laisser faire par lui-même.
Cet article a été rédigé par Marc-Olivier Desmarais, CPA, Pl. Fin.
Il est planificateur financier indépendant. Sa pratique est encadrée par l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) et par l'Institut de Planification Financière (IPF).
À travers les articles de Portefeuille 101, son objectif est de contribuer à la littératie financière et de stimuler la réflexion en matière de finances personnelles.
