La courbe de rendement inversée: prélude à une récession?

Un des indices utilisés par les économistes pour prévoir la performance de l’économie est la « courbe de rendement ». Pour certains, c’est le seul indice qui n’a jamais menti.

En termes simples, la courbe de rendement est une représentation graphique qui compare le niveau des taux d’intérêt sur les obligations gouvernementales de différentes échéances.

La forme et l’inclinaison de la courbe donnent des indices sur la santé et l’évolution de l’économie.

Une courbe de rendement normale reflète des taux à long terme plus élevés que les taux à court terme:

la courbe de rendement normale

Lorsque les taux à court terme rejoignent ou dépassent les taux à long terme, on voit alors apparaître une courbe de rendement inversée (inverted yield curve ) :

la courbe de rendement inversée

Depuis la fin 2017, les taux à court terme augmentent beaucoup plus rapidement que les taux à long terme. La courbe de rendement s’aplatit. Le 17 mai 2018, un article du Financial Post annonce même que, pour la première fois depuis 11 ans, les taux des échéances de 10 ans ont brièvement dépassé les taux des obligations 30 ans. Phénomène temporaire mais que d’aucuns voient revenir en force d’ici 2019.

La courbe de rendement inversée est-elle un signal de récession prochaine?

Pour plusieurs, c’est le prélude à une récession. En tous cas, c’est l’opinion de représentants de la banque fédérale américaine, dont l’un des rôles est de fixer le taux d’escompte. De fait, le modèle utilisé par la banque fédérale de New-York pour prévoir les récessions est entièrement basé sur la forme et l’inclinaison de la courbe de rendement.

Un représentant a récemment déclaré que toutes les récessions que nous avons connues depuis 60 ans ont été précédées d’une courbe de rendement inversée. La possibilité d’une récession est d’autant plus grande qu’on prévoit 3, voire 4, hausses de taux d’intérêt en 2018. La raison est que l’un des mécanismes employés par la Fed pour fixer les taux d’intérêt consiste à acheter ou vendre les obligations fédérales sur le marché. Or il est admis que cette pratique influence beaucoup plus le niveau des taux courts que des taux longs.

 

LA VRAIE QUESTION:

Comment une récession affecterait la gestion du portefeuille ?

 

L’idée n’est pas de tenter de prédire s’il y aura ou non une récession. On sait maintenant qu’une récession est fort possible d’ici un ou deux ans.

L’idée est de savoir comment l’occurrence d’une récession devrait influencer la gestion de notre portefeuille de placements.

Si une récession se produit, les choses suivantes pourraient se produire :

  • La banque centrale pourrait surseoir à des hausses de taux d’intérêt, ce qui diminuerait d’autant l’attrait des titres obligataires.
  • Le marché boursier pourrait reculer. Le rendement des titres à dividendes augmenterait, dans la mesure où la récession n’entraînerait pas de réduction de dividendes.  

Une réaction typique est de vendre des titres de façon à augmenter les liquidités et ainsi protéger le portefeuille des pertes en capital encourues dans un contexte de récession. Puis, ces liquidités seraient utilisées pour racheter à rabais des titres qui auraient perdu  de la valeur lors de la crise.

 

La position de PORTEFEUILLE 101

 

Nous sommes partisans de l’approche fondamentale. Nous investissons dans des titres dont la valeur intrinsèque est inférieure à leur valeur marchande. La vente de titres pour augmenter les liquidités du portefeuille parce qu’on anticipe une récession est une stratégie perdante. Au-delà des bavardages, très peu d’investisseurs (s’il en est) sont capables de prévoir quand la baisse des titres se produira. Et encore moins sont capables de prédire quand ce sera le temps de racheter les titres à rabais, post-récession.

La débâcle de 2008 est un exemple frappant :

Suite à la faillite de Lehman Brothers et au premier rejet du Bank Bailout Bill par le Congrès américain, l’indice S&P 500 a perdu plus de 7% de sa valeur, dans la seule journée du 29 septembre 2008. Six (6) mois plus tard, soit le 6 mars 2009, l’indice a subi une baisse additionnelle de 37% pour s’établir à 735. Or le 31 mars 2010, soit 13 mois plus tard, le S&P avait regagné 60% pour revenir à son niveau de mars 2009. Sauf que plusieurs investisseurs qui avaient vendu leurs titres avant la crise n’étaient toujours pas revenu dans le marché… Mais les quelques-uns qui ont profité de la chute brutale de la bourse pour acquérir des titres à rabais ont réalisé des rendements exceptionnels !

Les bourses canadiennes ont connu une situation semblable. Voyons comment certains titres connus (et toujours recommandés par PORTEFEUILLE 101) se sont comportés au cours de ces années :

Prix 31-mars-18

vs

Prix pré-crash

Pré crash

31-août-08

26-févr-09 31-mars-10 31-mars-18
Banque TD 31,07 18,7 37,85 73,65 137%
Dividende 1,20 1,24 1,24 2,68
% Div 2018 sur prix 2008 et 2018 3,9% 8,6%
Emera 21,17 19,03 23,66 40 89%
Dividende 1,00 1,00 1,12 2,24
% Div 2018 sur prix 2008 et 2018 4,7% 10,6%
Banque Scotia 48 31 51,8 79 65%
Dividende 1,96 1,96 1,96 3,28
% Div 2018 sur prix 2008 et 2018 4,1% 6,8%
Eaton Vance TA Fd 18,4 11,12 22,86 25,65 39%
Dividende 1,44 1,44 1,44 2,16
% Div 2018 sur prix 2008 et 2018 7,8% 11,7%

Constats :

La plupart des titres ont maintenu leurs dividendes au cours du crash. Aucune perte de rendement pour les actionnaires.  

Treize mois après la débâcle, les titres boursiers avaient repris leur valeur “avant crash”. 

◆ La valeur des titres a continué d'augmenter au cours des 10 années subséquentes. Dans plusieurs cas, cette valeur a doublé.

◆ Le rendement des dividendes sur le prix « avant crash » des titres a augmenté entre 30% et 50%.

 


En conclusion
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  • La courbe de rendement donne une information utile aux partisans de stratégies techniques. Car ceux-ci sont centrés sur les mouvements à court terme du marché. Elle est peu pertinente pour les partisans de stratégies fondamentales qui investissent à long terme.
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  • Les titres dont la valeur marchande baisse en raison d’une récession peuvent représenter d’excellentes occasions d’achat. Non des raisons de vendre. Seules leurs données fondamentales respectives doivent être prises en compte.
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  • Conserver un titre à dividende permet de continuer à percevoir un revenu automatique. Vendre le titre pour augmenter l’encaisse diminue d’autant le rendement du portefeuille.
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  • Toutes les récessions ont été suivies de reprises importantes des marchés. Ce ne sera pas différent la prochaine fois.
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  • PORTEFEUILLE 101 propose une structure de portefeuille valable peu importe l’état des marchés.